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J’ai commencé à voyager après que des étudiantes Australiennes soient venues dans mon lycée pendant un an. Je me suis dit que si elles en étaient capables, alors partir six semaine seule devrait bien se passer. L’une d’entre elle avait vécu chez moi, donc après mon bac, je suis partie la voir en Australie puis je suis ensuite allée en Tasmanie en voir une autre. Aujourd’hui je voyage encore, en famille ou seule avec ma fille de huit ans.
L’Australie, pour son impact, car c’est là où j’ai réalisé que je ne voulais pas poursuivre les études auxquelles je m’étais destinée et où j’ai osé dire à mes parents que je voulais arrêter. Cela a entraîné beaucoup de changements. Également le Togo, où je suis allée sept ans plus tard comme volontaire en tant que professeur de français langue étrangère.
L’Alsace, qui m’a fait réaliser les énormes différences culturelles au sein même d’un pays ! Je pensais que ce serait la même chose, mais c’est l’ensemble des différences face à ma région d’origine qui m’ont vraiment marqué : les magasins fermés dès le samedi à 15h, les noms mêmes des pains à la boulangerie que je ne connaissais plus, le vocabulaire, le fait que beaucoup de monde parle alsacien. On a même eu des remarques très déplacées sur l’accent parisien de mon mari. Comme je ne m’y attendais pas, le choc en a été d’autant plus grand.
Une vraie prise de confiance en moi, je suis capable de faire les choses en en étant obligée. C’est facile dans le quotidien de repousser les choses à plus tard, de compter sur les autres, quand on voyage à plusieurs on peut se cacher derrière les autres. Mais du coup on ne se met pas en danger ! Seule, on est face à soi, si on a vraiment envie de quelque chose on est obligée de dépasser cette appréhension qu’on peut avoir. A chaque fois que je reviens, je réalise à quel point je suis capable de faire des choses par moi-même. Ça me booste en termes de confiance en moi.
Oui et non, cette idée de confiance en soi, j’ai l’impression que j’ai besoin de voyager pour l’entretenir. Si j’espace trop les voyages, parfois je peux me retrouver à dire que je ne voyage pas tant que ça. J’ai un peu tendance à oublier. C’est l’enfermement dans le quotidien qui fait cela, notre organisation de tous les jours qui m’anesthésie un peu. Voyager est comme une piqûre de rappel qu’on est totalement maître de son quotidien.
En revenant d’un stage au Canada, en atterrissant à l’aéroport de Paris, j’ai eu une révélation. En voulant sortir, je me suis retrouvée entourée des passagers d’un vol venu d’Afrique -donc des passagers majoritairement noirs. Je me suis placée dans la file pour sortir du bâtiment, mais un agent de sécurité est venu me voir et m’a dit que je pouvais sortir, en doublant tout le monde. J’avais à peine 20, j’étais impressionnable, je n’ai pas osé dire non, donc je me suis exécutée et j’ai remonté toute cette file pour sortir. Jusque-là je me disais que c’est pratique de voyager quand on est une fille, parce qu’on va plus vite à certains contrôles, qu’on ne vérifie pas forcément mon sac etc. Cette fois, pour la première fois, je me suis pris en plein visage tout ce qu’il pouvait y avoir de plus complexe, tout le racisme qu’on ne perçoit pas quand on est une femme blanche. C’est là que j’ai réalisé que je pouvais avoir plus de privilèges que d’autres, avec toutes les implications que cela peut avoir. Cela m’a mis à ma place, de ce que je suis et ce que je ne pourrais jamais prétendre ne pas être. Surtout que maintenant, je suis une femme blanche, française, avec un enfant.
J’ai une vision très négative des choses : la raison pour laquelle on pense que c’est dangereux est ce qui fait que c’est dangereux d’être une femme dans notre société aujourd’hui. Le danger est le même quand on sort de boîte à Paris ou quand on se promène au milieu de touristes à l’autre bout du monde. C’est juste être une femme qui pose un problème. Finalement on n’est pas plus en danger ailleurs car on est en danger partout ! Quand on regarde la réalité des violences faites aux femmes, ailleurs cela pourrait mieux se passer, ou être pire.
Je trouve que les personnes qui tiennent ce discours sont majoritairement des femmes, pas des hommes. Je pense que c’est vraiment un travail que les femmes doivent faire sur elles-mêmes, sur ces freins. Il faut oser le faire, quitte à partir avec des copines, puisque le danger est là parce que vous êtes une femme, pas parce que vous êtes seule. Donc pourquoi pas commencer à voyager à plusieurs, puis progressivement seule. Les hommes, en tout cas dans mon entourage, ne m’ont jamais fait de remarques sur le fait que je voyage seule, alors que les femmes oui. Des messages intériorisés peut-être ?
Je n’ai jamais eu d’expérience vraiment catastrophique. La seule chose qui me revienne, c’est une entorse que je me suis faite au Togo. J’avais eu des retours sur les hôpitaux au Togo et l’état du système de santé en dehors de la capitale, et je voulais absolument éviter de connaître les conditions de traitement sur place. Un des Togolais avec moi a observé ma cheville, qui avait gonflée comme un ballon, et m’a massé avec de la crème hydratante. Et d’un coup, le gonflement avait disparu ! Tout le village m’a ensuite prise en charge, on m’aidait beaucoup, l’esprit de communauté était incroyable. Je ne m’attendais pas du tout en revanche aux réactions locales face à ma guérison : étant très blanche de peau, ma cheville est passée du violet, au bleu ou au jaune, ce qui a beaucoup choqué puisque leur peau noire ne permet pas de voir tout ce processus de guérison ! Ils pensaient que mon pied gangrenait ! Un ostéopathe m’a plus tard dit que j’avais eu une chance extraordinaire d’être soignée de cette façon parce que je n’en avais gardé aucune séquelle.
Ne pas hésiter à voyager dans un cadre sécurisé. Quand je suis partie comme volontaire, cela s’est fait dans un cadre sécurisé. Cela permet d’avoir des interlocuteurs formés pour cela, des professionnels. Pareil, mon séjour en Australie, j’avais des contacts sur place. Avant de partir au Cambodge, j’avais discuté avec une Belge expatriée sur place, ce qui m’a permis d’avoir un contact sur place en arrivant. Même le numéro de l’ambassade est suffisant, cela permet de se raccrocher à quelque chose qui peut nous aider sur place en cas de problème, ce que la famille restée à la maison ne peut pas faire.
J’aime beaucoup manger ! Manger au Japon est incroyable. J’ai le souvenir spécifique d’avoir été invitée dans un très bon restaurant, et de m’émerveiller devant le raffinement des plats et leur beauté. Je pensais que leur côté esthétique était toujours exagéré dans les films ou dans les livres, mais en fait pas du tout.
En réalité, voyager avec ma fille n’a pas changé grand-chose, je voyage plutôt en mode « slow-travel » en plus. Avec un enfant, on a beaucoup plus de contacts avec les gens sur place, on rencontre plus de monde. Les gens viennent plus vers nous, s’attendrissent, et l’enfant, puisqu’il a beaucoup moins d’inhibitions, va souvent vers eux, donc on suit derrière. En Sicile ma fille n’avait aucun problème à aller s’asseoir et discuter avec les gens dans le train. Les gens sont toujours prêts à aider, et sont même parfois déçus qu’on ne leur laisse pas un peu de temps avec son enfant ! Par exemple, dans un restaurant en Croatie, la serveuse voulait absolument tenir mon bébé pendant que j’allais aux toilettes ! Evidemment, cela disparaît quand l’enfant grandit et se transforme en petit ado…
J’ai passé une semaine en Sicile avec ma fille qui avait alors deux ans. De manière générale, je trouve que cela se passe bien, le plus dur à mon avis n’est pas d’être une voyageuse mais d’être une maman. Les difficultés sont les mêmes où qu’on soit : a-t-elle faim ? soif ? veut-elle dormir ? Le changement de cadre est agréable car il permet de changer un peu le quotidien, d’être plus détendu.
Evidemment voyager peut-être déstabilisant pour eux, car ils ont moins de repères. Mais des repères, ce ne sont pas forcément quatre murs et un lit, cela se créé ! Nous avons voyagé pendant un an et demi en continu, le repère que je lui avais créé était des petits chevaux en feutrine acheté au Kirghizstan en suspendus au-dessus de son lit. Donc où que nous étions, dans la cinquième comme la quinzième location, là où je suspendais ces petits chevaux en feutrine, c’était son lit. Les repères ce sont surtout les parents. Les voyages, pour eux, c’est aussi l’accumulation de câlins, de temps passé ensemble, des livres qu’on leur lit, c’est ça qui les nourrit de l’intérieur. Je pense que c’est un investissement pour l’avenir, voyager leur permet aussi de découvrir de nouvelles choses, de nouvelles saveurs ou de nouvelles langues. Ça aide à les construire en tant que personnes. Les voyages forment la jeunesse !
Quand on est que toutes les deux, nous formons une équipe, du coup on prépare tout ensemble. Il faut expliquer à l’enfant ce qui se passe et ce qui est prévu. Cela évite les surprises. A deux, j’ai besoin qu’elle écoute tout ce que je dis, par exemple pour des questions de sécurité, donc il faut aussi que je sois à son écoute. Par exemple quand elle était petite, il fallait qu’elle tienne la poche de mon pantalon pendant le temps où je prenais des photos. Il faut mettre des petits trucs comme cela en place. Et puis franchement, toutes les mamans qui sont en solo au quotidien, si elles sont capables de le faire en temps normal, je pense qu’elles sont tout à fait capables de faire la même chose en voyage !
Il n’y a pas besoin d’aller loin pour faire un vrai voyage. Dans un même pays on peut avoir des vrais chocs culturels, découvrir de nouvelles choses comme de nouveaux plats. Ce n’est pas parce que vous n’avez pas passé vingt heures dans un avion que ce n’est pas un voyage ! Ce n’est pas la distance qui compte, on se fait plaisir, on s’enrichit tout autant.
Tiphanya est notamment l’auteur du livre « Voyager avec un bébé » aux éditions Partis Pour. Pour retrouver ses récits de voyage, c’est par ici.
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